Mon grand-père avait une impressionnante collection de
livres, pas seulement que de livres d'ailleurs. Tout ce qui lui passait
sous la main devait avoir de la valeur pour lui car il gardait tout et
n'importe quoi. Quand il est parti au crépuscule des années 60, il a
hélas fallu se débarrasser de la plupart de ses affaires. Fort
heureusement, tout n'a pas été englouti dans des conteneurs et quelques
bouquins hantaient toujours le grenier de ma grand-mère. Je m'y engouffrais
avec la joie simple et forte qui possède l'enfant prêt à découvrir ses
cadeaux de Noël. J'ignore de quand date cet ouvrage
mais vu les références chronologiques qui émaillent la lecture, je pense
que ce livre doit avoir été écrit fin du XIXe siècle, début du XXe
siècle.
J'ai
parcouru avec délectation quelques chapitres. Le langage fleuri et
expressif, naïf aussi, les gravures claires et détaillées m'ont soufflée
en même temps qu'ils m'ont fait beaucoup rire. Ce que ces pionniers
aventuriers ont vécu font vraiment passer nos explorateurs modernes pour
de simples touristes.

Tout
est bien qui finit bien, comme dans les meilleures histoires sauf
que... Appelé vers d'autres missions, il décide d'attacher son compagnon
canin près de sa tente car il doit approcher des singes et Pescador n'a
pas l'air de les apprécier. Alors qu'il est à bord d'une pirogue pour
traverser un fleuve, Pescador veut suivre son maître et s'étrangle au
bout de sa laisse. Un homme d'équipe coupe sec la corde qui étouffait le
chien qui s'élance vers l'embarcation. "A l'exclamation de l'Indien,
je me retournai et je vis mon pauvre chien poursuivi par six caïmans
qui étaient sortis du fouillis de plantes aquatiques de la rive. J'avais
laissé mon fusil à bord du vapeur, mais, l'eussé-je tenu tout armé, je
n'eusse certes pas réussi à le sauver, car à peine l'avais-je vu,
nageant de toutes ses forces, le cou tendu vers moi, qu'un des sauriens
le saisit dans ses formidables mâchoires et plongea aussitôt. Mes yeux
s'attachèrent à la place où ils avaient disparu, et je vis longtemps des
bulles d'air monter à la surface de l'eau jaunâtre, d'où je conclus que
Pescador était dévoré en cet endroit même, au fond de l'étang." ©