Depuis
la nuit des temps, l'homme rêve de voler. Combien de fois n'avez-vous
d'ailleurs pas eu la sensation de vous élever dans les airs et
d'échapper aux lois de la gravité dans vos songes nocturnes ? C'est
comme si c'était inscrit en nous, au plus profond de notre être, dans la
mémoire collective...
Extraite du "Magasin pittoresque" de 1853, cette caricature du XVIIIe siècle intitulée "Le volomaniste"
met en scène un homme affublé de babouches ridicules à l'extrémité en
spirale. Autour de son cou, s'enroulent deux ficelles au bout desquelles
flottent deux aérostats. Dans sa main droite, il met en évidence un
médaillon sur lequel sont gravés ces mots : "J'ai fait parler de moi". Dans l'autre main, il tient deux fleurs et sur son dos, pendent des feuilles (où l'on lit "volcans éteints")
grignotées par un rat. Il enjambe deux épées qui se croisent. On peut
donc supposer qu'il s'agit d'un dessin satirique dont la portée dépasse
le cadre du vol en ballon. Les premiers vols officiels en ballon à air
chaud datent de 1783 et les échecs précédents ont dû faire railler les
commentateurs et caricaturistes de l'époque. Même si cette estampe
laisse entrevoir quantité d'autres éléments qui ont vraisemblablement
diverses explications. N'étant pas spécialiste, je ne m'aventurerai pas
sur ce terrain.
La découverte des frères Montgolfier échauffe les imaginations et cette gravure présente un poisson aérostatique poussé par le vent et dirigé par des rames qui ont l'apparence de plumes gigantesques. Des indigènes étonnés regardent l'engin survoler paisiblement les eaux sillonnées de voiliers.
Bateau vole !
On
dirait que les engins volants se sont inspirés de l'ingénierie navale.
N'est-il du reste pas significatif qu'une bonne partie du vocabulaire
propre aux objets volants provient de l'univers nautique ? Ne dit-on pas
le vaisseau, la navigation, la flotte, les hublots, le cargo, etc. dans
les deux cas? Dans l'imaginaire, les
sensations de flotter et de voler sont similaires. Le bateau qui vogue
et le ballon qui vole offrent au voyageur des émotions analogues, sans
doute cette même impression de liberté.
Si
l'histoire a surtout retenu l'épopée des frères Montgolfier, il est
utile de rappeler qu'une invention est aussi le fruit des inspirations
passées. La découverte technologique ou scientifique est le brassage
d'idées, l'assemblage
de visions. Alors que l'inventeur apparaît comme un être solitaire, son
inspiration se gave des expériences d'autrui et les améliore, les
peaufine, comme s'il avait la mission de rassembler ces cogitations
éparpillées, cette intuition collective afin de faire naître
l'aboutissement.
L'aéronaute
français Jean-Pierre Blanchard (1753-1809) construit d'abord des
automates, avant de s'intéresser à la voiture à pédales et à la machine
hydraulique. Il travaille surtout à la conception d'un vaisseau volant
doté de six ailes et d'un gouvernail. Une démonstration publique de
l'engin est organisée, le 5 mai 1782 mais celui-ci ne décollera pas.
Qu'à cela ne tienne, ans le sillage des frères Montgolfier, près de deux
années plus tard, il conçoit un ballon gonflé à l'hydrogène, muni d'une
hélice et de rames en plumes mues par la force des bras. Les curieux
sont venus en nombre sur le Champ de Mars à Paris, pour assister à
l'ascension d'un aérostat. Poussé par le vent, le ballon franchit la
Seine pour revenir se poser rue de Sèvres. Il fit dans divers pays, une
soixantaine de démonstrations.
Le 20 février 1808, alors qu'il exécute sa 66e ascension, il est frappé d'apoplexie et fait une chute de plus de 60 pieds. Il décèdera un an plus tard, vraisemblablement des conséquences de cette chute. ©
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire