jeudi 22 décembre 2011

Bibliothèque illustrée des voyages autour du monde : aventuriers des temps oubliés

Mon grand-père avait une impressionnante collection de livres, pas seulement que de livres d'ailleurs. Tout ce qui lui passait sous la main devait avoir de la valeur pour lui car il gardait tout et n'importe quoi. Quand il est parti au crépuscule des années 60, il a hélas fallu se débarrasser de la plupart de ses affaires. Fort heureusement, tout n'a pas été englouti dans des conteneurs et quelques bouquins hantaient toujours le grenier de ma grand-mère. Je m'y engouffrais avec la joie simple et forte qui possède l'enfant prêt à découvrir ses cadeaux de Noël. J'ignore de quand date cet ouvrage mais vu les références chronologiques qui émaillent la lecture, je pense que ce livre doit avoir été écrit fin du XIXe siècle, début du XXe siècle. 
J'ai parcouru avec délectation quelques chapitres. Le langage fleuri et expressif, naïf aussi, les gravures claires et détaillées m'ont soufflée en même temps qu'ils m'ont fait beaucoup rire. Ce que ces pionniers aventuriers ont vécu font vraiment passer nos explorateurs modernes pour de simples touristes.
Olivier Ordinaire signe un chapitre sur l'Amazonie, digne d'un récit de film hollywoodien de série B. Il explique que les Indiens éprouvent - à juste titre - du ressentiment à l'égard des blancs parce que ceux-ci leur ont apporté des maladies inconnues jusqu'alors qui déciment leurs tribus : la petite vétole, le rhume (oco), la peste (muru)... L'explorateur explique donc qu'il est poursuivi par des hordes d'indigènes et qu'il trouve refuge dans une cabane "Je me rappelais alors que les Conibos, aussi bien que la plupart des autres sauvages, ont une extrême répugnance à verser le sang, fût-ce celui de leur mortel ennemi, dans l'intérieur de la case qu'ils habitent." Accompagné de son chien Pescador, ce Tintin avant la lettre parvient à se débiner en offrant des cadeaux aux Indiens. "Tout cela est pour toi, lui dis-je. Je veux être l'ami des Conibas de l'Ucayali, comme je suis ceux du Pachitea, qui ne m'auraient pas donné les objets, précieux pour moi, que tu as vus dans la pirogue, s'ils m'avaient cru capable de cacher le muru dans mon sac."
 
Tout est bien qui finit bien, comme dans les meilleures histoires sauf que... Appelé vers d'autres missions, il décide d'attacher son compagnon canin près de sa tente car il doit approcher des singes et Pescador n'a pas l'air de les apprécier. Alors qu'il est à bord d'une pirogue pour traverser un fleuve, Pescador veut suivre son maître et s'étrangle au bout de sa laisse. Un homme d'équipe coupe sec la corde qui étouffait le chien qui s'élance vers l'embarcation. "A l'exclamation de l'Indien, je me retournai et je vis mon pauvre chien poursuivi par six caïmans qui étaient sortis du fouillis de plantes aquatiques de la rive. J'avais laissé mon fusil à bord du vapeur, mais, l'eussé-je tenu tout armé, je n'eusse certes pas réussi à le sauver, car à peine l'avais-je vu, nageant de toutes ses forces, le cou tendu vers moi, qu'un des sauriens le saisit dans ses formidables mâchoires et plongea aussitôt. Mes yeux s'attachèrent à la place où ils avaient disparu, et je vis longtemps des bulles d'air monter à la surface de l'eau jaunâtre, d'où je conclus que Pescador était dévoré en cet endroit même, au fond de l'étang." ©

dimanche 11 décembre 2011

La beauté éternelle à tout prix


Comme l'écrit l'Ecclésiaste dans la Bible, il n'y a rien de neuf sous le soleil. "Ce qui est a déjà été, et ce qui sera a déjà été". Pour preuve, les préoccupations humaines les plus futiles n'ont guère changé. Comme jadis, nous désirons toujours paraître, et surtout être beaux. Jetez donc un coup d'oeil sur ces délicieuses réclames extraites du Petit Parisien du 30 octobre 1904. Un poitrine opulente pour madame, une barbe ou des moustaches aguichantes pour monsieur, des modificateur des formes du nez pour rectifier les appendices rebelles à l'esthétisme conventionnel. Tout semblait possible. Il suffisait d'une lotion miracle pour que les poils se développent et même dès l'âge de 15 ans, promettait-on. Une pommade magique efface les rides, les rougeurs de la peau, les cicatrices, les taches de rousseur... et la farine hongroise ôte des paupières et de l'oeil tout signe de fatigue. Dire que la tyrannie de la beauté à tout prix ne faisait que commencer. ©




samedi 3 décembre 2011

Quelle mouche les piquait donc ?

En somme, le monde ne change pas vraiment. La presse à sensation non plus. Notre intérêt morbide pour l'horreur, le supernaturel, l'incompréhensible non plus. 

Voici une perle épinglée dans "Le Petit Parisien", le supplément littéraire illustré du 30 juillet 1911. Comme vous pouvez, de fait, le constater, tout est dans l'image. Un bi-jou, vous dis-je !

Journal français ayant eu ses heures de gloire entre 1876 et 1944, "Le Petit Parisien" est l'un des quatre plus fameux quotidiens français de l'avant-guerre. D'abord de gauche, le journal devient finalement populaire. Au début du XXe siècle, le quotidien écoulait un million d'exemplaires. A la fin de la 1re guerre mondiale, plus de deux millions d'exemplaires sont vendus. Il s'agit du plus gros tirage au monde!

L'heure du déclin sonne cependant à la Libération. Pendant l'Occupation, le gouvernement militaire allemand transforme le journal en organe de propagande. Pierre Dupuy qui avait succédé à son père aux rennes de la société, est suspecté de collaboration. Il sera acquitté mais c'en est fini du "Petit Parisien" dont la réputation a été irrémédiablement souillée. ©