vendredi 13 mars 2015

Contes de Grimm et souvenirs en apirama

J'ignore pourquoi je recherche de plus en plus la tendresse et l'émerveillement attachés à l'enfance. Le chemin vers un âge qu'on dit vénérable, semble être une progression vers une envie plus pressante de pureté. Dans les bouquineries, je m'attarde souvent dans le coin de lecture réservé aux enfants. C'est fou le nombre de livres précieux que les gens peuvent abandonner sur les étagères branlantes des boutiques de seconde main. Précieux par leur imagerie, leur odeur tenace de papier jauni, leur charme vieillot. 
Je ne suis pas forcément en quête de bribes de mon enfance car j'affectionne tout particulièrement les albums d'images du début du XXe siècle. Récemment, j'ai eu le bonheur de dénicher des contes de Grimm illustrés par Jean Morette, chez Hachette, un album dont la première édition date de 1946. Les aquarelles me paraissaient sorties de l'imagerie de Meli, l'ancien parc d'attraction d'Adinkerke (La Panne). Le trait pastoral, les couleurs chaleureuses, le ton jovial et bon enfant me ramenaient, au fil des pages sculptées par le temps, aux émotions pastel d'une enfance bercée par les contes narrés par la Mère l'Oie battant maladroitement ses ailes mécaniques à l'entrée du parc Meli. 
Cette illustration ne fait-elle pas songer à l'âne trônant sur la terrasse du self-service, qui transformait nos 5 sous en pièces d'or fourrées de chocolat ? J'entends encore  son braiement entêtant et je vois encore la pièce dorée jaillir, du beau milieu de ses fesses au moment où je m'y attendais le moins.
Les personnages qui peuplaient le parc avaient la bonhommie, les rondeurs, le crâne lisse et les joues rouges des dessins de Jean Morette. Je me revois caressant le ventre rebondi du mangeur de papier adossé à la petite maison, qui aspirait les détritus, Holle Bolle Gijs. "Papieerrrrr, papieeerrrrr", annonçait-il en roulant les "r" comme on sait le faire en Flandre. "Pour vous, les frites, pour moi, le papier." 
Je me souviens le village d'Hamelin, en admirant ces façades ciselées, tellement pittoresques. Je me souviens du bourgmestre qui apparaissait de temps à autres à sa fenêtre, promettant un sac d'or à quiconque parviendrait à débarrasser sa ville des rats qui l'infestaient. Je me souviens de l'effrayant ogre ronflant bruyamment derrière quelques buissons. Ou du géant barbu faisant les cent pas entre les arbres du Bois des Contes.
Voilà tout ce que quelques images peuvent éveiller... Elles nourrissent nos rêves, attisent nos souvenirs qu'on croyait éteints. ©

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire